Mon pied est en position, ma ceinture bouclée. À ma droite, les voitures passent à toute vitesse, il est temps d’accélérer, je retiens mon souffle, c’est toujours un peu stressant de s’insérer dans ce flot constant de circulation, je me concentre, je trouve ma place, et je m’y glisse : j’y suis, je fonce sur l’autoroute. De nouveau, j’ai trouvé le courage et la force, j’ai pris la rampe de lancement, c’est parti :
C’est la rentrée !
Eh oui, la fin des grandes vacances et le début de l’année scolaire me rappellent chaque année cette bretelle d’autoroute, cette rampe de lancement, qui me demande courage, concentration et énergie pour l’affronter, la vivre, m’y lancer.
Le début de l’année scolaire m’a toujours impressionnée. Enfant, ado, étudiante, les larmes et l’angoisse m’envahissaient à l’idée de ces premiers jours d’école. Et dans ma tête, cette voix qui répétait : « Je ne vais pas y arriver, je n’ai pas la force ». Entre les larmes, j’expliquais à ma maman que je ne voulais pas retourner à l’école, que j’avais peur, que c’était trop difficile. Elle m’écoutait et je savais qu’à la maison, j’avais mon équipe de supporters, ceux qui m’encourageraient à oser, qui croyaient inconditionnellement dans mes capacités et qui m’aimeraient au-delà de toute mauvaise note en dictée. Alors, j’appuyais timidement sur l’accélérateur, espérant trouver ma place, en suivant un rythme bien à moi.
Il me fallait juste le courage d’essayer.
Je me donnais la permission de pleurer, de douter, de me sentir submergée mais aussi celle d’oser, de chercher la force, de vivre, de me trouver des amies, d’aimer apprendre et d’apprécier l’école. Il me fallait juste la patience de passer par cette rampe de lancement et par les turbulences qu’elle amenait.
Peut-être qu’en cette période de rentrée, tu te sens comme moi à cette époque : découragée, apeurée, pleine de doute et avec l’envie de fuir cette rampe de lancement.
Alors laisse-moi être la voix qui te rappelle ce qui m’a toujours aidée :
« Permission de douter, d’hésiter, d’avoir peur, permission d’essayer, d’oser, de réussir, d’être fabuleusement toi ! Courage, ça va aller, sois patiente avec toi-même, et puis, tu as si souvent pris des rampes de lancement et trouvé ta place, tu n’es ni seule, ni faible, ni incapable : tu es la bonne personne, fais-toi confiance, accélère, lance-toi ! »
Les rentrées ne sont pas seulement impressionnantes, elles sont éreintantes !
Tout comme notre voiture qui consomme énormément d’énergie lors de l’accélération, tu utiliseras pendant cette période une grande quantité de forces et de concentration : tes turbines vont tourner à plein pouvoir. Alors sache que toi aussi, tu as besoin de ressources ! Penses-y, tu auras besoin de te reposer, de ne pas charger ton agenda ni celui de tes enfants jusqu’à ras bord. Ce n’est pas le moment d’y rajouter des rendez-vous supplémentaires et non nécessaires. Dans une interview, Jen Hatmaker, autrice américaine et maman de 5 enfants, insiste sur le fait que la semaine de la rentrée devrait être la plus vide de toute l’année : les enfants rentrent complètement vidés de leurs premiers jours d’école et ce dont ils ont besoin — tout comme nous —, c’est de calme pour récupérer et pas de challenges supplémentaires à gérer.
J’avoue que je n’y avais jamais pensé comme ça. La rentrée demande tant de forces, qu’il est important de pouvoir souffler à la maison. C’est juste une question de quelques jours, après un temps, la routine se remet en place, la phase d’accélération est passée et un rythme de croisière familial reprend. Ouf !
Alors oui, cette rampe de lancement est une vraie épreuve pour tous et elle peut l’être plus encore quand on est aidante. Les listes de choses à ne pas oublier, à anticiper, à préparer peuvent occuper nos esprits à chaque instant et nous donner le tournis, une sensation de vertige face à la tâche, l’impression de porter le monde sur nos épaules. Parce que, lorsque nos enfants sont des écoliers à particularités, un peu différents, on ressent encore plus fort l’impression que le système scolaire est bien étriqué et vieux.
On sort toujours un peu du cadre, on ne remplit pas les cases “normales”.
Il faut parfois se battre, parfois être très entêtés pour que nos droits et ceux de nos enfants soient respectés. Il faut expliquer sans dramatiser, quémander de l’aide, contredire les préjugés, soutenir les regards et les attentes, et espérer pour le mieux.
Nos enfants nous observent. Ils ont tant besoin que nous ayons la foi et le courage, que nous ayons confiance en eux mais aussi en leur pairs, en leurs instituteurs et institutrices. Ils écoutent nos mots, avancent à tâtons dans leur milieu scolaire tout en s’inspirant de notre attitude.
J’aimerais tant que nos enfants voient que l’on traite leurs amis, le personnel qui les prendront en charge comme des alliés et non des ennemis. Qu’on ose leur demander ce dont on a besoin sans être gêné ni constamment en colère, qu’on leur explique ce qu’ils devraient savoir, qu’on partage, que l’on communique, que l’on rame ensemble, chacun du mieux que l’on peut.
Bien entendu, il y a aura des blocages, et des ratés d’un côté comme de l’autre, mais n’oublions pas que nous sommes tous humains, nous faisons des erreurs et nous en ferons toujours. Mais il est possible de s’excuser, de pardonner et de réessayer jusqu’à trouver des solutions plus adaptées. Nous sommes tous en chemin, nous apprenons constamment et nous avons besoin de compassion, pour nous-mêmes et pour les autres.
Alors, une fois la rampe de lancement passée, lorsque nous serons enfin en route, il sera essentiel de garder les yeux sur notre but. Peu importe si certaines voitures qui nous entourent sont plus rapides, plus “chics” ou ont un moteur plus puissant. Chacun va à son rythme, poursuivant ses buts, en fonction de ses valeurs et capacités.
Nous avons notre vie à vivre et non celle des autres à envier.
Qu’importe s’ils ont ce que nous n’aurons jamais, qu’importe si leur chemin paraît plus agréable, facile, plus joli : parce que la seule chose que nous avons à portée de la main, c’est notre vie, nos enfants, nos chemins, nos voitures cabossées d’amour et de larmes, de beauté et de douleurs, d’imperfection et de bonheur.
Alors courage, tu n’es pas seule à avoir peur d’appuyer sur l’accélérateur, ni la seule à parfois avoir le tournis, à tomber de fatigue à la fin de la journée, à ne plus en pouvoir de passer ton temps à expliquer, à demander, à faire confiance, à échouer. Tu n’es pas seule et tu n’es pas non plus la seule à te relever, à trouver le courage de te lancer, à ouvrir tes bras pour porter et motiver ton entourage, à faire avancer la prise en charge de tes enfants spéciaux. Tu es fabuleuse et nous sommes si fiers de toi !
Lance-toi, ça ira !
Bonus : Le coin des enfants
En préparant cet article, j’avais envie de faire une version pour nos enfants. Un texte à leur partager, ou juste quelques mots pour les encourager. Comme un gros câlin qui leur dit : « Tu n’es pas seul et on est avec toi, courage, ça va aller. »
La rentrée, c’est impressionnant pour tout le monde. Certains aiment découvrir leur nouvelle classe, l’instituteur, les éducateurs qui les accompagneront durant cette nouvelle année scolaire. D’autres se sentent submergés par ces premiers jours d’école, comme si une immense pression écrasait leurs poumons et les empêchait de respirer bien profondément et de rester calme. Enfant, je pleurais souvent le soir avant la rentrée. J’avais l’impression que je n’y arriverais jamais, que tout était “trop” et que le monde autour de moi était menaçant, stressant, trop rapide, trop exigeant. Est-ce que c’est comme ça pour toi aussi ? Voici quelques trucs que j’ai appris au cours des années et qui pourraient peut-être aussi t’aider :
#1 La rentrée, c’est impressionnant mais ça peut être très intéressant.
Que découvres-tu de nouveau ? Quelle est ta matière préférée ? Est-ce que certains enfants ont déjà l’air de vouloir devenir tes copains ? Cela demande des forces et du courage de reprendre le chemin de l’école. Fais un pas à la fois. Tu as le droit d’être impressionné, fatigué, d’avoir des questions ou même d’avoir peur. Cela fait partie de nous d’avoir autant d’émotions et le mieux c’est d’être curieux et de se dire : « Oh, je me sens triste. » Tu peux réfléchir : « Mais pourquoi en fait ? Ah oui, mon amie à changé d’école. OK, alors je suis triste, c’est normal, ça va passer. » Tu as la permission d’avoir toutes ces émotions.
#2 Parfois, les autres, aussi les adultes, ont besoin d’indices pour nous comprendre.
Au début, quand les autres ne nous connaissent pas bien, c’est chouette quand on prend le temps d’expliquer un peu qui on est, ou ce qu’on a, surtout si on est un peu différent du reste des enfants. Ce n’est pas grave si tout ne fonctionne pas parfaitement dès les premières heures de cours. On est tous là pour apprendre.
#3 Les premiers jours d’école vont te demander beaucoup d’énergie et de concentration.
C’est presque comme si tu participais aux Jeux Olympiques, alors pas de panique si tu es complètement crevée quand tu rentres à la maison. Pas besoin d’en faire plus ces jours-là : repose-toi et rappelle-toi que dans quelques jours tu retrouveras toute ton énergie, tu te seras de nouveau habitué à l’école.
#4 Certains enfants ont très tôt peur de l’échec, de rater, d’avoir des mauvaises notes.
Alors la peur les encercle comme un grand lasso qui les serre de plus en plus, elle bloque tout, on n’apprend plus rien convenablement, on va encore plus lentement, on regarde autour de soi et on se dit : « Zut et rezut, ils y arrivent tous si facilement et moi, je suis nul et je n’arrive à rien. » Comment faire dans ces cas-là ? D’abord, rappelle-toi que ce que les autres font, ce n’est pas important, c’est leur chemin à eux, ils ont leurs épreuves, leurs forces, leurs faiblesses. Tu es unique, tu as un chemin unique. Certaines choses te sembleront faciles, d’autres vraiment très difficiles. Ce n’est pas grave, c’est la vie, on est tous humains, personne ne réussit toujours tout.
D’ailleurs, souvent, c’est quand nous nous trompons que nous apprenons le plus. Eh oui ! Quand on se trompe, on recommence, on réessaye, on trouve de nouvelles manières de réussir. C’est comme les inventeurs : bien souvent, ils ont fait des essais et des essais et encore plus d’essais pour un jour, trouver une solution. Sois-en certain, tu es aussi un inventeur et même si tu fais tout pleins d’erreurs, un jour, tu réussiras, tu découvriras ta solution. Ne perds pas courage, aie confiance en toi, demande de l’aide, et sois ton meilleur allié, celui qui te dis tous les matins : « Allez zou, je te trouve génial et je serai là pour toi, je resterai gentil avec toi, peu importe que tu réussisses ou que tu échoues mais en tout cas : on va essayer ensemble ! »
#5 L’école, c’est comme une construction un peu vieille, un peu cassée et pas très pratique.
Parfois, on a l’impression qu’on n’y est pas à notre place, tout est trop étroit, monotone et compliqué. C’est comme si nous étions des poissons à qui on demande de grimper sur un arbre. Rassure-toi, ce n’est pas toi qui es cassé, bizarre, bête ou mal construit : c’est le système qui est souvent un peu nul. Et ce système ne change pas rapidement, c’est comme un mammouth endormi qui avance à la vitesse des escargots. C’est énervant d’attendre que les choses s’améliorent. Alors rappelle-toi que le monde est plus intéressant, plus grand, plus génial que les écoles et que si à l’école tu te sens un peu comme sur une route ennuyeuse, inintéressante, un peu cassée, il te reste tant de choses à découvrir en dehors. Le monde est bien plus diversifié, intéressant, grand, et tu en fais partie !
#6 Rappelle-toi que tu n’es pas seul.
On est fier de toi. Alors oui, on se réjouit quand tu aimes aller à l’école et apprendre, on aime t’écouter parler de ce que tu apprends, de ce que tu trouves intéressant. Mais on est aussi là, si un jour tu as eu une journée qui t’as donné l’impression d’être le poisson le plus nul de tout l’aquarium ou quand tes camarades de classe ou même tes professeurs te font payer leur mauvaise humeur. On est là pour écouter, parler, ne rien dire et surtout, te rappeler qu’à la maison, tu seras toujours aimé, peu importe les points, les gaffes, les réussites ou les moments de grande fatigue. On est un peu comme ton fan club. On sait que tu as beaucoup à faire et beaucoup à apprendre et que parfois tu voudras laisser tomber. On sera là pour te rappeler que tu as des forces en toi, que tu peux dépasser tes limites, que tu trouveras ton chemin et seras l’inventeur un peu fou des idées uniques qui sont les tiennes. Allez, zou, courage, attache ta ceinture, on va démarrer !