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Enfants extraordinaires

Et si c’était un burn-out ?

Laure Japiot-Gouesse 20 février 2023
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« Déprimée, moi ? Non non, je suis juste un peu stressée/agacée/fatiguée en ce moment… Mais ça va passer, ne t’inquiète pas. » Voici une phrase que j’ai souvent prononcée il y a quelques années, alors que je frôlais de près le burn-out parental. J’étais la maman d’un bonhomme de 2 ans très atypique que je ne comprenais pas, enceinte de son petit frère et complètement terrassée par les injonctions de maternité idéale… Je n’allais franchement pas bien mais j’avais tellement honte de ne pas “y arriver” qu’il m’était impossible de l’admettre. Je préférais banaliser mon mal-être, m’accabler de reproches et multiplier les résolutions que je ne parvenais pas à tenir – ce qui alimentait la dégringolade de mon estime personnelle.

Te reconnais-tu dans un ou plusieurs de ces mots, chère Fabuleuse ?

Alors sache que tu n’es pas la seule : selon les données de la littérature médicale, entre 2 et 12 % des parents seraient en burn-out parental. Et cette proportion grimpe sensiblement quand ils sont, en plus, aidants.

Voici comment Moïra Mikolajczak et Isabelle Roskam, docteures en psychologie et professeures à l’Université de Louvain, le décrivent : « Ces parents se sentent à bout, épuisés émotionnellement et physiquement par leur rôle de père ou de mère. Ils finissent par se distancier de leurs enfants et par perdre le plaisir de partager du temps ou des activités avec eux. La simple présence de ces derniers suffit parfois à les agacer. Il arrive alors que ces parents aient des idées noires, qu’ils aient des paroles ou posent des actes regrettables vis-à-vis de leurs enfants. Ils ne se reconnaissent plus, culpabilisent et, souvent, n’osent pas en parler. »

D’après ces autrices, le burnout parental résulte d’un excès de stress pendant trop longtemps.

Il dépend de nombreux facteurs : socio-démographiques (nombre d’enfants, superficie du logement…), situationnels (enfants porteurs de handicap par exemple), personnels (compétences émotionnelles des parents, perfectionnisme…), éducatifs et familiaux (partage des tâches entre les parents…). Aucun de ces facteurs n’explique à lui seul le burnout mais lorsque l’accumulation de “stresseurs” n’est pas compensée par des ressources suffisantes, la balance se déséquilibre et le parent perd pied.

Or d’après une étude des mêmes autrices,

les parents d’enfants à besoins spécifiques sont les plus à risque de burnout

– toutes autres conditions confondues. Tu me vois venir, chère Fabuleuse ?

De manière générale, je ne pense pas trop m’avancer en disant que les aidants familiaux sont certainement tous touchés par le stress chronique. Dans un article publié dans le journal Health Psychology, un groupe de chercheurs a analysé seize études faisant état de la prévalence du Syndrome de Stress Post Traumatique chez les parents d’enfants atteints de maladies chroniques. Dans ces données regroupées, un constat effarant a été fait : 22,8% de cette cohorte de parents souffraient de ce syndrome.

En effet, accompagner au quotidien un proche porteur de handicap ou de maladie occasionne un ensemble de situations stressantes : une routine quotidienne particulièrement chargée, des changements imprévus et parfois des épisodes traumatiques (hospitalisation, annonce de diagnostic…). 

Fort heureusement, ce stress ne conduit pas nécessairement au burn-out !

Mais connaître cette vulnérabilité particulière permet d’être plus vigilante aux éventuels signes avant-coureurs. Tu sais, cette tension qui s’installe durablement dans tes cervicales, ces insomnies qui deviennent récurrentes, cette irritabilité qui ne te quitte plus… Toutes ces alertes sont des messages de ton corps pour te signifier que tes batteries sont à plat et qu’il est grand temps de réagir.

Alors, comment faire ?

J’imagine combien il peut être difficile de t’entendre conseiller à longueur d’articles de prendre soin de toi, alors que le quotidien te rappelle sans cesse combien ton proche a besoin que tu prennes soin de lui en priorité.

Ce tiraillement entre deux injonctions contradictoires peut même contribuer à ton stress… 

De mon côté, pour être très honnête, je ne suis pas un exemple en la matière : même si j’ai bien progressé, je me laisse encore bien souvent engluer dans ma propre charge mentale ! Mais je peux t’indiquer quelques pistes, préconisées par  Moïra Mikolajczak et Isabelle Roskam, qui m’ont aidée :

  • Retirer ou alléger certaines sources de stress (ex : réduire le nombre d’activités extra-scolaires, simplifier les menus, faire livrer les courses…)
  • Ajouter des ressources ou les optimiser (déléguer davantage de tâches au conjoint/aux enfants/à un employé/à une association…)

Note : ces deux premières pistes obligent déjà à un certain lâcher-prise (oh le vilain mot ^^) sur ce qu’on estime devoir à nos proches, et ce n’est pas une mince affaire !

  • Travailler à l’acceptation de ce qu’on ne peut pas modifier (ex : belle-famille trop loin ou trop âgée pour prendre le relais)
  • Réduire l’écart entre nos idéaux et notre situation (apprendre à considérer l’idéal comme un phare qui guide et non comme un but à atteindre)
  • Apprendre à gérer le stress (l’identifier le plus tôt possible, en comprendre ses déclencheurs et développer des outils d’apaisement – relaxation, méditation de pleine conscience, pratique de la gratitude…)

Tu auras probablement reconnu dans ces idées de nombreux « ingrédients » souvent mis en avant chez les Fabuleuses aidantes.

Mais le plus important me semble être celui par lequel tout commence : oser la vulnérabilité. Lorsqu’on se sent dépassée, la tentation est grande de s’isoler et de chercher à tout prix à masquer ses faiblesses. Pourtant, demander de l’aide à des proches ou, si besoin, à des professionnels, peut vraiment t’apporter un répit salutaire.  Personnellement, je ne serais peut-être jamais sortie de cette période sombre sans le soutien précieux d’une psychologue qui m’a inlassablement répété que j’étais une “mère suffisamment bonne”, selon la formule du pédiatre anglais Winnicott, et que l’ambivalence était indissociable de la parentalité ! 😉

Enfin, si tu veux mieux comprendre les mécanismes du stress et découvrir pas à pas quelques clés pour éviter d’en arriver au burn-out, je t’invite de tout cœur à suivre la formation gratuite qu’Anna et Brunella t’ont concoctée sur cette thématique.

Chère Fabuleuse, je voudrais terminer ce texte en te disant : au final, c’est toi qui sais.

Ta situation est unique et tu es la meilleure experte de toi-même. Prends juste le temps d’écouter ta voix intérieure, celle dont tu sens qu’elle est ton alliée (pas celle qui te juge, attention !) et fais toi confiance. Tu es DÉJA fabuleuse et tu vas trouver ton chemin ! ☺



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Cet article a été écrit par :
Laure Japiot-Gouesse

Laure est psychologue, ex-journaliste et maman de trois garçons, dont l'aîné est « atypique » (haut potentiel et hypersensible). Elle est rédactrice pour les Fabuleuses aidantes.

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