Conjoints aidés

Marcher ou de l’éloge de la lenteur

Axelle Huber 17 mars 2025
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Il y eut ces fois où nous partions en famille ou avec des amis, marchant aux côtés de l’aidé, d’abord appuyé sur sa canne puis dans son fauteuil.

Il y eut cette fois où je partis marcher en mode randonnée, quelques jours avec ma fille aînée à Belle-Ile, profitant d’une cure de chimio à l’hôpital pour mon fils afin de pouvoir m’absenter en toute sécurité. 

Et puis il y a ces fois, quotidiennes, où, toute aidante que je sois, je pars marcher, me promener, seule, à deux ou trois, durant une petite heure aux alentours de chez moi.

Il y a les adeptes de la marche rapide, dite nordique, bâtons à la main. Et puis les pros de la marche lente dont je suis, par besoin de ralentir, de dire stop. Surtout avec le gros sac à dos qu’est l’aidance.

Giono disait :

« Si tu n’arrives pas à penser, marche ! 

Si tu penses trop, marche

Si tu penses mal, marche encore ! »

Quelle sagesse chez cet auteur, tant les bienfaits de la marche sont variés !

La marche est bonne pour le corps

Quand j’étais ado, les parents m’invitaient à venir prendre l’air, ce qui n’allait pas de soi à cet âge… Je reconnais aujourd’hui que la marche permet une oxygénation du cerveau et jamais je ne regrette d’avoir pris ce temps de marcher. Marcher libère les endorphines et procure un mieux être, améliore l’immunité. Le cœur, les os, les articulations, les muscles, les intestins s’en trouvent mieux. La marche régule naturellement le stress et permet d’éviter angoisses et dépression. Elle ralentit le vieillissement et améliore l’immunité, elle permet de mieux intégrer les vitamines. La marche améliore l’état de santé général, la qualité de son sommeil et le moral.

La marche est bonne aussi pour l’esprit

Marcher me permet de me sentir vivante, si vivante. De flâneries en déambulations, je me perds parfois un peu pour retrouver mon chemin. Dans ma vie d’aidante, je me garde ces précieuses minutes pour aller marcher, sans trop savoir toujours dans quelle direction aller. Parfois je ne pense à rien, heureuse de ne pas toujours prévoir mon itinéraire. Je sens que la marche débloque des choses, fait prendre de la distance face à des ruminations, que le chemin m’appelle. Marcher me donne de m’évader, de me reconnecter à moi-même. Ce mouvement me vide la tête, je lâche prise, je décompresse, j’apaise et me libère des tensions intérieures. 

La marche est bonne pour le cœur

Elle permet la gratitude et l’émotion de joie qui naît de la contemplation de la beauté. Reliée à la nature, célébrant la beauté des pierres, je marche, la tête en l’air, le nez au vent. Je découvre à chaque promenade une nouvelle occasion de me réjouir : ici le héron cendré sur le petit lac, juché sur une patte, là les épis de faîtage ou les colombages d’une maison jusqu’ici passés inaperçus, ou encore ce petit érable du Japon aux couleurs chamarrées.

Je savoure, à mon rythme. J’ouvre grand mes narines, mes yeux, mes oreilles, je laisse mes mains caresser de temps à autre une écorce, un feuillage. Et j’avance, Je mets un pied devant l’autre. Heureuse de pouvoir le faire, à l’unisson de mon corps, de mon cœur, de ma tête. J’aime cet éveil des sens en lien avec mon esprit, et tout ceci met mon cœur en joie.

La marche est bonne pour l’âme

Selon les jours et les humeurs, marcher permet de ne pas ou de ne plus penser, de ne pas ou de ne plus ruminer ou bien carrément à l’inverse d’exercer une pensée féconde et créatrice. Le mouvement de la marche inspire un mouvement de l’âme. Le balancement de la marche, les couleurs et les rythmes des saisons de la nature engendrent une réaction de tout l’être, engagé et présent dans cet ici et maintenant. Les sens en éveil, je vide certes mon esprit et je remplis mon âme, toute dirigée vers une quête de sens : dans quelle direction veux-je conduire ma vie d’aidante ? Goethe disait  : « C’est pour savoir où je vais que je marche. » Marcher permet de trier, prioriser, réorganiser ses pensées et ses actions. Et par exemple de m’interroger :

  • Pourquoi une telle épreuve ?
  • Quel sens lui donner ?
  • Comment lui répondre avec plus d’amour ?
  • Pourquoi ça tombe sur moi et pas un autre ?
  • À quoi ça sert de marcher et que ferai-je au retour du chemin ?
  • Y a t-il un jour où je serai arrivée ?
  • Quelle marcheuse veux-je être ? Où aller ? 

Marcher permet de se centrer sur ce qui est important, et d’entrer dans une démarche de méditation qui est bonne pour tout mon être.

L’avantage de la marche, c’est qu’elle est peu onéreuse

Facilement accessible, du moins pour l’aidant, et ce toute l’année (ou presque selon les environnements). Une paire de baskets (ou pour certains pieds nus !), et hop en avant ! Elle induit peu de blessures. 

Elle se fait seul ou à plusieurs. Elle peut être simple et courte. Lorsque l’on part marcher avec son aidé en situation de handicap physique, la marche se complique, certes, mais reste possible. Il faut anticiper un peu pour choisir un itinéraire praticable. Et parfois s’équiper de l’un de ces formidables fauteuils adaptés, motorisés ou non, pour emmener son aidé en randonnée.

Dans mon accompagnement des aidants comme des personnes en deuil, j’invite souvent à marcher et à, de temps à autre, tenter de bannir cette volonté d’aller vite, pour se faire nomade quelques minutes, quelques heures ou quelques jours. Il y aura des moments de grâce et des moments de lassitude ! Des splendeurs et des misères. Marcher, ça décape souvent. Même si l’on ne s’en rend pas compte dans l’instant et que la révélation ne tombe pas d’un seul coup.

Car la quête du bonheur est un long chemin.

Et toi, chère Fabuleuse, quand as tu marché pour la dernière fois ? Veux-tu enfiler tes baskets et faire un tour ?



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Cet article a été écrit par :
Axelle Huber

Coach et thérapeute, Axelle Huber accompagne aujourd’hui les personnes sur des enjeux de connaissance de soi, de compétences émotionnelles et relationnelles,  de développement personnel, et notamment dans des contextes de ruptures de vie comme peuvent l’être l’aidance ou le deuil. Elle donne des conférences et anime des ateliers sur ces sujets.

Elle est l’auteur de Si je ne peux plus marcher je courrai, Mame 2016 et  de Le deuil, une odyssée, mame 2023.

https://axellehuber.fr

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