Nos sens peuvent nous apporter à la fois des informations tellement précieuses et à la fois nous desservir, s’ils sont ressentis trop fortement, ou pas assez, par rapport aux stimuli. On parle alors d’hypersensibilité dans le langage courant, ou d’hyper réactivité sensorielle dans un jargon plus spécialisé (traduction du trouble Sensory proccessing disorder, SPD, diagnostic reconnu dans les pays anglo-saxons).
Des enfants avec une hyperréactivité sensorielle, j’en ai plusieurs parmi mes petits protégés.
Et leurs parents le sont parfois aussi. Aujourd’hui, j’ai eu envie de vous partager les mots de Marie-Laure, la maman d’une enfant avec un trouble du spectre de l’autisme.
On parlait ensemble de journées contenant autant de défis que d’heures, dès le réveil…
Réveil à 4h du matin ce jour-là, en raison des troubles du sommeil de ma chère petite protégée. « Après son départ à l’école et le nettoyage du poulailler, j’ai pris mon café et ma clope à haute technologie de tabac chauffé dans mon jardin, en regardant mes poules creuser leurs nids sous les arbustes et en écoutant le chant matinal des oiseaux.
Je t’écris maintenant cet email avec la truffe de mon chien posée sur mes genoux et ses yeux qui me proposent une promenade avec insistance… Ce sera pour plus tard, je dois dormir quelques minutes avant de pouvoir redémarrer ma journée pour la deuxième fois et tenir jusqu’au soir sans avoir envie d’envoyer mon enfant dans une fusée pour la lune !
Mais je crois que ce sont précisément les crissements de la terre encore givrée sous les pattes de mes poules, le concert que m’offrent merles et moineaux tous les matins, la teinte rosée du ciel encore brumeux et le bruit des jouets à “pouët” de mon chien qui me font puiser en moi l’énergie d’avancer. Et c’est le plus beau cadeau que m’ait fait ma fille, je redécouvre le monde au travers de ses yeux d’enfant. Je prête attention aux détails qui me paraissaient précédemment insignifiants ou acquis. Et je me dis que même si l’homme part en vrille sur notre planète, que même si je fonds en larmes dans ma cuisine parce que je n’ai pas dormi, les oiseaux, eux, n’en ont rien à foutre et reprendront leur chant demain à l’aube.
Et que c’est ça, le bonheur. Des moments de grâce qu’on n’aurait pas su apprécier sans les défis du quotidien ».
En la lisant, j’ai eu des frissons.
Même en ayant commencé sa journée à 4h du matin, Marie-Laure a orienté son focus sur les cadeaux qui se présentaient à elle afin d’en ressentir une émotion positive, représentant un puissant carburant pour affronter sa longue journée. Elle a ouvert tout grand ses sens pour ressentir et percevoir des détails qui ne lui auraient peut-être pas paru si beaux il y a quelques années.
L’hyperréactivité sensorielle de ma petite protégée engendre un quotidien semé d’embûches.
Il crée chez sa maman autant de détresse que de reconnaissance, car grâce au vécu de sa fille, Marie-Laure décrit emprunter des chemins qu’elle n’aurait pas soupçonné présent dans sa vie auparavant. Le sentiment de gratitude peut se ressentir à travers ce qu’on observe, ce qu’on sent ou entend dans la vie de tous les jours. Si on met le focus sur ces détails extraordinaires de notre environnement, on peut trouver un nombre infini de cadeaux. Ces cadeaux qui permettent d’avancer, heure après heure dans des journées remplies de défis hauts comme des montagnes.
Comme le dit Hélène Bonhomme, le cadeau c’est la gratitude.
Marie-Laure nous rappelle que dans les plus grandes détresses, on peut y trouver nos plus grandes inspirations. Chez les Fabuleuses, on connaît l’histoire de l’écureuil d’Hélène et de l’arbre ressemblant à celui des cartes de Mémory. À présent, je vais aussi me souvenir de l’histoire des poules de Marie-Laure et du pouët de son chien. Car elle me rappelle combien ce moment-là a représenté quelques minutes de douceur dans sa journée.
Chère Fabuleuse,
Je te souhaite une douce journée, remplie de détails à observer, d’odeurs à renifler, de surfaces à toucher, de mouvements à écouter. Et qu’ils soient un cadeau pour toi.