Enfants extraordinaires

Aidante, moi ? Non, quand-même pas…

Une Fabuleuse aidante 13 novembre 2023
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Chère Fabuleuse aidante,

À partir de quel point on s’autorise à se dire qu’on en ch… plus que les autres ? Que faut-il exactement pour se permettre de se dire à soi-même : « C’est normal que je sois déboitée-débordée-larguée dans mon administratif-en retard, je suis sur d’autres fronts, après tout ».

Peut-être que le premier frein à se dire “aidante”, c’est que dans notre esprit, ce terme impose à l’autre un statut d’aidé. Et ce n’est pas toujours simple à gérer, parce que personne n’a envie de dire de son parent qu’il est “un assisté”, ou de son enfant qu’il est hors normes “à ce point là”.

Tu sais ce que ça me rappelle ?

Ça me rappelle ce moment où tu as eu ton premier enfant. Combien de kilowatts as-tu dépensés pour faire croire à tes amies célibs ou non mamans que ta vie n’avait pas changé avec l’arrivée de cet enfant ? Moi, énormément. J’ai tenté de continuer à aller en boite, à partir en week-end de copines avec mon nourrisson qui ne faisait pas ses nuits en écharpe, à reprendre le footing le plus vite possible. « Si je fais comme si ça n’existait pas, je peux continuer comme les autres, je peux tenir le même rythme, accomplir les mêmes choses, me lancer les mêmes défis ».

Sauf que la réalité de ce bébé, c’est qu’il remplit autrement ta vie et qu’il puise en permanence dans tes réserves. Bref, les ressources sont allouées ailleurs et le nier ne fait que te mettre en échec. « Mais pourquoi tu n’arrives pas à récupérer en deux jours d’une nuit blanche, comme Marie-Géraldine ? » Oh, je ne sais pas, peut-être parce qu’à sept heures du matin tu es sur le pont pour le biberon-chocapic de ton enfant ?

Pourquoi je te parles de ça ?

La comparaison entre le statut de maman-au-milieu-des-non-mamans avec celui de maman-aidante-au-milieu-des-mamans-non-aidantes a du sens dans la mesure où la tentation bien naturelle, dans les deux cas, est d’enfiler sa tenue de camouflage. « Non, moi non plus, je n’ai pas changé, je suis toujours celle qui… est comme toi »

Pourquoi n’ose-t-on pas dire : « J’ai d’autres contraintes que toi, je ne veux pas te les imposer, mais je ne peux pas non plus faire comme si elles n’existaient pas » ? Il n’y a rien d’absurde à assumer le fait de sauter les réunions de rentrée parce que tu es déjà chez l’équithérapeute le lundi soir, chez l’orthophoniste le mercredi matin, chez le psy le jeudi soir et que le week-end tu essaies d’offrir du temps aux autres enfants, ceux qui n’ont pas leur maman pour eux tous seuls le mardi, le mercredi et le jeudi. 

Tu n’es pas obligée de le crier à la face du monde…

… et de faire de cette réalité que tu vis, un statut officiel. Rien ne t’impose de montrer du doigt ton parent, ton conjoint, ton enfant comme s’il s’agissait d’un boulet que tu traines. Toi et moi, on sait bien que c’est tellement plus complexe : boulet une heure, merveille la minute suivante, selon ta fatigue, l’humeur du jour, le menu de la cantine, l’encouragement de la maîtresse reçu au bon moment…

Ton quotidien est fait de montagnes russes dont aucun instant ne peut-être extrait et raconté sans raconter tous les autres, parce que rien ne ressemble moins à ta réalité qu’une image figée. C’est parfois plus simple de ne pas trop s’étendre, pour ne pas créer chez l’autre une image faussée, partielle de soi et de son enfant / parent / conjoint. Parfois je me sens aidante, quand l’orthoptiste m’engueule d’avoir oublié le rendez-vous de mon deuxième alors que c’est elle qui l’a déplacé, et que la routine est ma garantie de tout faire tenir dans ma semaine.

Je me sens aidante quand l’école m’appelle quatre fois en cinq jours, pour un enfant angoissé, une autre qui s’est claquée la porte de la cantine sur les doigts, un mal de tête qui ne passe pas et une crise d’allergie à faire trembler les murs. Et je me sens toucher le ciel quand ma fille me dit « Je sais bien que tu es fière de moi. Ça se voit », quand mon fils réussit à boutonner tout seul le col de son polo, quand ma mère m’envoie une carte alors qu’écrire lui prend des heures.

Vis à vis de soi, se reconnaître aidante, ou “parfois aidante”, c’est déjà énorme.

Se dire à soi-même « Oui, mais tu es aidante, n’oublie pas », ce n’est pas se trouver des excuses pour en faire moins que les autres. Ça ne sert pas non plus à se dédouaner de cet énième retard au boulot pour cause de crise carabinée au moment d’enfiler des chaussettes qui grattaient trop. C’est simplement le rappel que tu as encore plus besoin qu’une autre d’être douce avec toi.

Ce texte nous a été transmis par une Fabuleuse aidante, A.



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